Les fonds de pension s’écroulent
Un Tchernobyl financier a culbuté les fonds de pension du monde entier, sans que cela n’émeuvent le gouvernement. Pas la moindre réaction sur cette chute monumentale d’un pilier du libéralisme économique, pas un mot avant la réforme des retraite de 2010.
Les fameux systèmes par capitalisation (fonds de pension) ont été promus par le gouvernement depuis l’arrivée du président au pouvoir après une réforme organisant la baisse des pensions du régime obligatoire par répartition. Situation cocasse, la crise a mis en évidence un aspect masqué des fonds de pensions : chacun met de l’argent sur les marchés financiers (via ces fonds) pour ses vieux jours (quand il en a les moyens…), sans qu’il soit sûr de percevoir, au bout du compte, une pension…
La preuve, dans une analyse de l’Economic Research Department de la BNP Paribas…
Ces système par
capitalisation (qu’on appelle aussi « épargne retraite » en France,
dont les encours ont dépassé les 93 milliards d’euros en 2006) sont
censés assurer une pension (bien méritée) à des dizaines millions de
cotisants en Europe et aux Etats-Unis. « La période récente a montré
les limites d’une telle formule. L’année dernière, les fonds de pension
privés du monde entier ont accusé de lourdes pertes, entraînant des
résultats décevants pour le secteur de l’épargne-retraite », a constaté
une étude publiée en octobre par l’Economic Research Department de la
BNP Paribas
«
Les conséquences de la tempête financière sur les fonds de pension »
(c’est le nom de cette étude), ont jusqu’à présent été accompagnées
d’un pesant silence politique, médiatique et suspect à l’approche du
rendez-vous majeur de la réforme des régimes de retraite, prévue en
2010.
A l’approche de la réforme fatidique, un salutaire débat sur les
fonds de pension serait-il donc interdit ? Il n’y a pas si longtemps,
le gouvernement entendait faire de l’année 2010 un rendez-vous majeur
de réforme des régimes de retraite. La « mère des batailles », comme
aime à le dire le ministre du Travail Xavier Darcos, a déjà son
calendrier : Une rencontre avec les partenaires sociaux d’ici la fin de
l’année pour tenter d’élaborer un diagnostic partagé et de s’entendre
sur les données chiffrées, puis la remise du rapport du Conseil
d’orientation des retraites en février 2010.
On se souvient que le même
Xavier Darcos avait une certaine idée de la réforme en juillet sur
France Inter : « On peut imaginer une capitalisation plus grande »,
espérait tout haut notre homme, confirmant une baisse, programmée par
le patronat du Medef, des pensions de retraite. Le même propos
apparaîtrait aujourd’hui incongru, même si le libéralisme ambiant
entretient l’idée qu’il faudra en passer par là, d’autant plus en
période de reprise économique.
Le ministre du Travail est-il bien
conscient des conséquences de la prochaine réforme ? En octobre 2008,
nous dit l’Economic Research Department de la BNP-Paribas, les actifs
de tous les fonds de pension privés des pays membres de l’OCDE ont
chuté de 3 300 milliards de dollars (Si l’on compare les déficits par
pays, celui de la Sécu est ridicule !), « soit 20 % de l’ensemble des
actifs détenus en décembre 2007 ».
Une ridicule note ajoute que si l’on
tient compte des régimes individuels aux Etats-Unis (comptes retraite
individuels) et dans d’autres pays, la perte atteint environ 5 000
milliards de dollars… Vertigineux !
Un véritable Tchernobyl financier,
et pas la moindre réaction à cela ! Les marchés financiers ont plombé
la poule aux œufs d’or, pourrait se dire Darcos. 5 000 milliards de
dollars partent en fumée, et le gouvernement s’engage dans la « mère
des batailles »… Et dans d’insondables abysses financiers, car le fin
expert de la BNP Paribas avoue : « On ignore, dans une large mesure, à
quel point les fonds de pension ont été exposés aux actifs dits «
toxiques » ».
L’étude se pose aussi une question, cruciale, nous
semble-t-il : Comment ces pertes se répartissent-elles ? Dans les
régimes à cotisations définies des retraites par capitalisation, « le
risque de placement est supporté par les souscripteurs. Les mauvaises
performances des fonds de pension pourraient avoir de sérieuses
conséquences, en particulier pour ceux qui s’approchent de l’âge de la
retraite. Ils ont, en effet, perdu une bonne partie de leur épargne
retraite et n’ont plus le temps de la reconstituer ». Cela va de soi…
L’explication a le mérite de la clarté, mais n’est pas un motif
suffisant pour sortir d’un système qui a prouvé la faillite des marchés
financiers, si l’on en croit l’Economic Research Department de la BNP
Paribas. « Rien ne permet de penser qu’un retour à un système de
retraites exclusivement public serait la bonne solution ». Pour le
secteur financier et bancaire, on l’aura compris.



